Par Chloé Cohen
Elle nous accueille dans ses bureaux en plein centre de Manhattan. Laetitia Gazel Anthoine se dirige vers la cuisine commune de l’espace de coworking pour attraper un café. « Vous en voulez un? » nous demande-t-elle, sourire aux lèvres et en toute simplicité. Cette entrepreneuse pétillante de 48 ans s’est installée à New York il y a un peu plus de deux ans pour développer l’activité de sa compagnie Connecthings.
Créée il y a 11 ans à Paris, « Connecthings permet aux applications mobiles de mieux connaitre leurs utilisateurs, de savoir ce qu’ils sont en train de faire et où pour adapter leur offre et envoyer des notifications au bon moment », nous explique la quadragénaire. Grâce à des balises, connectées en Bluetooth et installées dans les espaces publics (gares, aéroports…) les applications mobiles peuvent envoyer des informations sur votre smartphone, comme le temps d’attente d’un bus ou les taxis les plus proches. Une façon de rendre la ville plus « intelligente ».
Lancer son entreprise
Laetitia Gazel Anthoine est une pionnière dans son domaine. Douée, elle a fait une prépa scientifique puis la prestigieuse école d’ingénieurs Supélec (L'École Supérieure d’Électricité) avant de faire carrière dans la téléphonie portable, chez Orange notamment. On est à la fin des années 1990, ce sont les balbutiements du web, mais cette mère de quatre enfants voit immédiatement le potentiel d’internet. « En 2007, c’est la sortie du premier Iphone, mais les gens avaient dû mal à utiliser internet sur leur portable », reconnaît-elle. Elle décide pourtant de créer sa start-up, seule, car elle est « indépendante », et « n’aime pas qu’on décide pour elle de sa vie ». Si aujourd’hui cela semble évident de surfer sur internet avec un smartphone, Laetitia Gazel Anthoine a dû persévérer pour surmonter les obstacles et convaincre de potentiels investisseurs. Et l’entrepreneuse a réussi. Aujourd’hui Connecthingscompte une cinquantaine de salariés, et s’est développée en France, en Espagne, en Italie et ambitionne de devenir l’un des leaders sur le marché américain. « Ce n’est que le début du développement ici, rappelle Laetitia Gazel Anthoine, mais c’est prometteur on a des partenariats à New York et à Austin ».
Prendre conscience des différences entre la France et les Etats-Unis
New York s’est rapidement imposée comme une évidence, pour son potentiel bussiness, car c’est « une ville énorme, avec de nombreux services de transports et beaucoup d’agences qui créent des applications, explique-t-elle. La communauté tech à New York est très intéressante ». Mais l’installation sur un nouveau marché n’a pas été de tout repos. Pour sa famille mais surtout pour son entreprise. « Le marché est le même mais les méthodes marketing et commerciales sont très différentes de la France, alors plus vite on prend conscience de ces différences, plus vite on met en place les bons outils », conseille-t-elle. Et Laetitia Gazel Anthoine reconnaît qu’elle n’avait pas tout anticipé, comme embaucher trois commerciaux - un pour les rendez-vous téléphoniques, un pour les rendez-vous physiques et un pour signer les contrats - quand elle n’avait qu’une personne en France. « On a gagné en efficacité! », se réjouit celle qui prône l’adaptation aux difficultés. « On a eu plein d’échecs, s’amuse-t-elle, des produits qui n’ont pas marché, ou des membres importants de l’équipe qui ont démissionné, mais on a toujours réussi à rebondir, et c’est aussi une façon d’avancer».
Une équipe fidèle et impliquée
Laetitia Gazel Anthoine aime aussi donner de son temps pour aider d’autres entrepreneuses et entrepreneurs, car elle juge essentiel d’avoir des mentors pour créer son entreprise. Avec le Women Initiative Foundation (WIF), fondée début 2016 par Martine Liautaud, et qui propose un système de tutorat et un programme à la prestigieuse université de Stanford, elle aide les créateurs d’entreprises à s’installer aux Etats-Unis. « Je gère la phase d’atterrissage », aime-t-elle répéter. Et parmi les conseils qu’elle peut donner : « être ambitieux, voir grand et prendre du recul », pour « se focaliser sur l’essentiel et avancer plus vite ». Quand on lui demande enfin quelle est sa plus grande réussite professionnelle, elle nous répond spontanément, « avoir une équipe fidèle et impliquée ».